Résister à l'Islam Politique

Iran Occident Levant: djihadistes de EI

Le triangle Iran-Occident-Levant conduit l’Islam politique à des alliances diaboliques. Les ayatollahs qualifient leurs opposants de djihadistes de EI.

Iran Occident Levant: djihadistes de EI

Dans la nature, le contraste est la beauté en harmonie.

Dans une lettre ouverte, Albertine Ahmadi répond aux déclarations de Ali-Reza Panahiyan, membre éminent de la hiérarchie chiite et conseiller du guide suprême, Ali Khamenei.

Dans une réunion publique couverte par les médias iraniens, Ali-Reza Panahiyan déclarait : «ceux parmi nous qui sont grisés par l’Occident, ne sont pas différents des takfiris et des djihadistes de l’Etat Islamique (EI). » Plus loin, il ajoute que les Iraniens occidentalisés ne sont que des sionistes et des libéraux, et agissent comme des lames de rasoir pour scinder l’alliance sacrée des musulmans.

Cette information avait publiée dans un article de Fars News Agency et reprise par Al-Monitor en anglais. Le même jour, la décapitation de James Foley, journaliste américain, par un djihadiste d’EI faisait la une des médias. Qu’importe une coïncidence ou une déclaration délibérée, les ayatollahs de Téhéran ne ratent jamais une occasion pour dénigrer les Iraniens critiques du régime et les expatriés/réfugiés en Occident, en les considérant comme des «traitres» à la patrie.

Cette bassesse du clergé chiite est même ancrée dans l’esprit des expatriés Iraniens, trop enclins à une certaine paresse, afin de ne rien faire pour s’unir et constituer une force d’opposition crédible. Parmi eux, le credo est que le changement doit venir de l’intérieur de l’Iran. Tout le monde (sauf les ayatollahs) oublie que l’assise même de la Révolution Islamique de l’Iran a été Najaf (Irak) d’abord, puis Neauphle-le-Château (Paris- France) et certes pas l’intérieur de l’Iran. Qom a été le relais de Najaf et pas l’inverse.

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Cher Monsieur,

Cette lettre exprime mon profond mécontentement après votre récente déclaration à Téhéran. Par ce que je suis Iranienne, occidentalisée et libérale.

Quelques mots sur moi-même : je suis née en Iran, j’ai grandi dans une province parmi des gens que le régime actuel que vous défendez si ardemment, méprise. J’ai voyagé dans une douzaine de pays. J’ai vécu et travaillé dans six pays, dans les secteurs public et privé. Je parle trois langues. Je suis diplômée en économie, en histoire et en sciences politiques. J’ai partagé dans divers pays des moments forts avec des gens qui luttaient pour leur survie. J’ai partagé avec eux, dans leurs tragédies, le pain et le sel.

Etre « occidentalisé » pour moi ne veut pas dire sacrifier mon identité iranienne pour une identité occidentale prétendument supérieure. Pour moi, cela signifie le mélange des deux. Je peux comprendre les cas où, être occidentalisé peut signifier que l’on ne vit que pour le travail, que pour gagner de l’argent et le dépenser pour des bagatelles, comme cela se produit chez les bourreaux de travail de certains pays. Ceci n’est pas pour moi un chemin à suivre. Cependant, en étant que réfugiée / expatriée par votre régime pendant les 35 dernières années, je vous confirme que la fusion des deux, mon origine iranienne et les façons de faire occidentales, est méritoire. Prenons de simples exemples: fixer un rendez-vous à 12H00 et arriver à l’heure, tenir ma parole une fois qu’elle est donnée, et exprimer mes pensées avec franchise sans crainte de réaction violente, en paroles ou physique. Je suppose que vous pourriez attester que ces façons de faire ne sont pas dans la culture dominante de l’Iran d’aujourd’hui. Présentement en Iran nous sommes emmurés, nous dépérissons, et nous avons perdu le sens des réalités.

«Ceux parmi nous qui sont grisés par l’Occident, ne sont pas différents des takfiris et des djihadistes de l’Etat Islamique » est une déclaration pour le moins absurde …

Les Iraniens occidentalisés sont des êtres qui ont le privilège de sentir et pouvoir choisir le meilleur des deux mondes. Nombreux sont les Iraniens occidentalisés qui se sentiraient honorés, -humblement -, de partager leurs expériences, douces et amères, avec leurs concitoyens Iraniens ET occidentaux.

Peut-être que vous le remarquerez, si vous le voulez bien, cher Ali-Reza Panhiyan, que comme beaucoup d’autres Iraniens « occidentalisés », je me SENS Iranienne, je SUIS iranienne, au point que je suis prête à mourir pour mon pays, si cela peut faire une différence dans l’état actuel des choses.

Je ne suis pas sioniste. Je crois que des peoples différents peuvent et doivent vivre côte à côte, en paix. Je n’aime pas les politiciens américains et européens munis d’agendas cachés pour la conduite des politiques étrangères. Je n’aime pas la Realpolitik et le cynisme des relations internationales, où les peuples sont oubliés et sacrifiés. Je n’aime pas le régime saoudien pourri. Je déteste la terreur des djihadistes de l’EI et leur sauvagerie contre TOUS les innocents. Je n’aime pas le dogmatisme vain de l’Occident en consumérisme, pour l’individualisme à l’extrême, pour le capitalisme cow-boy où les banquiers traders détournent et s’approprient l’économie. Je méprise la froideur technocratique. Voyez-vous, il me semble que sur certains points, vous et moi, aurons des choses dire à nous dire.

Mais il y a aussi beaucoup de choses que je n’aime pas dans l’Iran actuel tel que vous l’avez façonné. Que dire de la corruption? Que dire de l’oppression religieuse? Que dire des persécutions ethniques? Que dire de népotisme politique? Que dire de l’absence de la liberté d’expression? Que dire de la propagande pesante et le lavage des cerveaux? Que dire de l’isolation de notre pays au plan international? Que dire de l’opacité qui règne dans les affaires publiques et politiques? Que dire des élections truquées? Que dire de la destruction de l’avenir et des espoirs de la jeune génération? Que dire du discours fictif sur la dignité des femmes tout en les traitant comme des citoyens de seconde zone, boniches des hommes? Que dire des mensonges, de l’hypocrisie ambiante? Ne reconnaissez-vous pas que tout cela existe? Si oui, en êtes-vous satisfait?

Je peux et je vais me battre contre tout ce que je n’aime pas dans les sociétés occidentales, dans l’isoloir de vote.

Je ne peux pas lutter contre les choses que je n’aime pas dans l’Iran moderne dans l’isoloir de vote. Le Vali-e Faqih ne me le permettra pas.

Je ne suis pas un démon qui veut mettre son pays à genoux. Je plaide en faveur d’un avenir meilleur pour lui. Un avenir fait d’un consensus de tous les Iraniens, indépendamment de leur religion, de leur origine ethnique, de leur sexe. Je pense que d’être libérale aiderait et conduirait MON PAYS dans cette direction. Je ne vous demande pas de saisir pleinement ou être d’accord avec tous mes points de vue. Mais je pense qu’un DIALOGUE entre vous et moi, est de la plus HAUTE IMPORTANCE pour que l’Iran sorte de sa stagnation morbide. Bien sûr, je peux louper quelque chose dans ce que je dis; vous seriez là pour me le rappeler. Et vice-versa: vous pouvez louper un point dans ce que vous dites; je serais là pour vous le rappeler. Ainsi, je vous suis indispensable. Encore une fois, dire que «Ceux parmi nous qui sont grisés par l’Occident, ne sont pas diffèrent des takfiris et des djihadistes de l’Etat Islamique » est absurde, même risible. Cela vous déshonore bien plus que cela ne peut m’humilier. Évitons de dire des bêtises.

Votre haine bizarre et paradoxale pour les États-Unis et l’Europe conduit notre pays à des alliances diaboliques au Moyen-Orient. Avec l’aide de stratégies tout aussi stupides et incohérentes que celles des États-Unis et des Européens, elle a ouvert les portes de l’enfer.

Aucun compte ne peut et ne doit être réglé par la violence. Tous ceux qui y ont cru ont tôt ou tard perdu. Nous devons changer de voie et laisser de côté la haine, la fabrication d’ennemis. La révolution islamique en Iran est finie. Nous ne pouvons plus en tant que nation, continuer à assurer notre avenir dans le despotisme théocratique et les promesses non tenues.

Construisons notre pays pour qu’il y soit doux de vivre, sans crainte, sans peur. Un pays dans lequel les enfants grandiront, fiers de leur pays, fidèles à leurs pensées, et prêt à partager avec les peoples d’autres nations leurs expériences de vie, douces et amères.

Je n’ai pas de lame, ni de sabre. Je n’ai que ma parole et mes principes.

Sincèrement,

Albertine Ahmadi, Iranienne, occidentalisée et libérale

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